🇫🇷Les portables en prison : « c’est pour appeler la famille » et les couteaux…pour la viande !⚖️

Audience au tribunal correctionnel d’Aix hier suite à la fouille de la prison de Salon en avril

Bah, c’est pour appeler la famille… » Réplique récurrente, hier matin au tribunal correctionnel d’Aix, où une audience était consacrée à la détention de portables par des « résidents » du centre pénitentiaire de Salon. Ce rendez-vous judiciaire fait suite à une fouille sectorielle déclenchée le 19 avril, dès potron minet et ciblant un demi-étage de bâtiment. Ce matin-là, rappelle le procureur Emmanuel Merlin, des agents pénitentiaires (dont les Eris, équipes régionales d’intervention et de sécurité) ont débarqué sans carton d’invitation en cellule.

Bilan : des portables, couteaux, stupéfiants… et 17 détenus convoqués hier. Luis arrive seul à la barre : « Chuis en permission », prévient-il en confiant que le portable déniché dans sa cellule lui fut remis par « un jeune sorti libérable. Je m’en servais le soir. J’ai pas beaucoup de parloir et j’appelais la famille ». Le procureur recadre : « On sait que ces portables servent à appeler d’anciens comparses, des complices, voire à préparer des choses… » Combien de détenus disposent ainsi illégalement d’un portable ? « Quasiment tous », apprendra-t-on.

Dans ce dossier, le procureur requiert huit mois ferme. Le président Eric Bienko Vel Bienek en prononcera trois. Puis Richard arrive des geôles où règne le brouhaha. Dans sa cellule, l’administration a trouvé portable, carte SIM et carte SD. « Le portable, un ami qui est sorti libérable me l’a donné ». Là encore, « pour appeler la famille ». Me Nadia Bouroumis complétera : « les téléphones ça permet la paix sociale en prison » et dénoncera « un acharnement, alors même que les téléphones ça arrange tout le monde ». Son client sera condamné à trois mois ferme, le parquet en avait requis huit.

Un couteau… pour la viande
Huit mois ferme, c’est la peine prononcée contre Fabrice, poursuivi pour avoir détenu dans sa cellule un portable, un chargeur, une carte Sim, une carte SD, deux grammes de résine de cannabis. Et un couteau. « On m’a tout donné », grommelle-t-il. Le cannabis ? « Oh je fume vite fait ». Le couteau : « C’était pour la viande et pour ma sécurité », lâche-t-il, peu disert. Moins, en tout cas, que lorsqu’il accueillit les gendarmes en cellule où il était justement en train de fumer. « Ces insultes feront l’objet d’une procédure », promet le tribunal.

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Plus tard, ce n’est pas pour un téléphone qu’est jugé Ari, mais pour le recel d’une machine à tatouer. « Il dit l’avoir fabriquée lui-même », relate le président. Libéré il y a peu, le prévenu n’est pas présent. Délibéré : deux mois ferme. Puis c’est pour une clé USB et un gramme de résine de cannabis, que Lyes arrive avec son codétenu. »La clé c’était pour écouter de la musique », justifie Lyes, la vingtaine, comme la majorité des prévenus de cette audience. Lui aussi aurait bénéficié de cette magnanimité qui affecte les détenus à leur sortie : « C’est un détenu sorti libérable qui me l’a donné, avec le cannabis ».
Jonathan, le codétenu, est ici pour un couteau muni d’une lame de 19 cm : « Il était dans un frigo que j’ai récupéré dans la salle d’activités. Si j’avais su qu’il y avait un couteau dans le moteur, vous pensez bien que j’l’aurais pas pris ! » Son voisin opine : « Ah non ! Il l’aurait pas pris ! » Au parquet, l’on s’interroge : « Le réfrigérateur était en cellule depuis deux mois… c’est n’importe quoi », à l’adresse du tribunal. En défense, Me Caroline Depouez insiste : « Tous deux livrent la même version et chacun reconnaît sa responsabilité », puis elle plaide la relaxe pour Jonathan, jugé pour la détention du couteau. Tous deux écoperont de trois mois.

Même peine pour Mohamed, qui raconte : « C’était l’anniversaire de mon fils alors j’me suis fait prêter un portable, et là, pas de chance ! C’est le lendemain, qu’il y a eu la fouille ». Il y avait aussi un peu de cannabis, « juste de quoi faire un pétard, hein », et une clé USB avec musique et photos. Le concernant, Me Depouez invoque « une vraie fragilité, pour cet homme isolé. En 30 mois de détention, jamais un rapport à son encontre ».

Hier 17 dossiers ont ainsi été examinés par le tribunal, qui a prononcé deux relaxes. Et entendu les arguments des prévenus : « Le téléphone de la prison, on y a droit jusqu’à 18h. Après, j’ai encore envie de parler, moi ».
La provence

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